Le fumier de cheval, une alternative aux pesticides
L’Écurie de la Ridaudière, en Maine-et-Loire, produit chaque année 6 000 m3 de fumier qui sont transformés en lombricompost. Un engrais riche en éléments nutritifs… et bio.
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L’idée
Lorsqu’il s’est installé en 1994 à la ferme de la Ridaudière, à Bécon-les-Granits (Maine-et-Loire), David Lumet avait 26 ans. Son capital, c’était la passion du cheval. Cavalier de haut niveau en saut d’obstacles, il commença par investir ses quelques gains – « En CSO, on ne fait pas fortune ! » – pour aménager des bâtiments en vue d’accueillir des chevaux. Il a travaillé dur.
85 box et 13 salariés
Aujourd’hui, l’Écurie de la Ridaudière compte 85 box et 13 salariés pour préparer les chevaux. « Au départ, nous avions 80 % de chevaux de concours hippique et 20% de chevaux de course. C’était difficile sur le plan financier. Aujourd’hui, les proportions se sont inversées, cela permet de gagner sa vie », souligne David Lumet.
L’écurie affiche complet. Et le fumier s’accumule : 6 000 m3 sont produits chaque année. À une époque, les fermes équestres l’échangeaient avec des agriculteurs contre de la paille. Ensuite, cela a pu être revendu aux exploitants de champignonnières, nombreuses dans la région. Mais les méthodes ont changé et le débouché s’est éteint.
À la Ridaudière, David Lumet cédait gratuitement le fumier à une société qui le recyclait. « Lorsqu’il a été question de me faire payer le transport, cela représentait un budget de 15 000 € par an. Pas question ! Alors, on a creusé l’idée du lombricompost. »
Le principe est simple. Après avoir été stocké pendant six mois, le fumier, en phase de décomposition, est livré à l’appétit de vers bien spécifiques qui engloutissent quotidiennement l’équivalent de leur poids. Des vers de luxe, originaires de Californie.
« Pour démarrer en 2011, j’en ai acheté 50 m2, cela m’a coûté 23 000 € ! » explique David Lumet. Heureusement, ils ont ensuite fait des petits ! Leurs déjections ont la particularité d’être riches en éléments nutritifs, en humus retenant l’eau… et d’être bio, car le transit capte toutes les molécules issues des pesticides issus de la paille des litières ou de l’alimentation des chevaux.
Clients maraîchers
Le fumier est disposé en andains sur 40 cm de hauteur. Une nouvelle couche de 20 cm est rajoutée dès que les vers ont tout ingéré. Lorsque la quantité de lombricompost est jugée suffisante, les vers sont mis à la diète. Ils migreront ainsi naturellement vers un nouveau tas de fumier placé en voisinage.
Libéré des vers, le lombricompost peut être traité. David Lumet a confié à la société angevine Tersen le soin de la préparation et du conditionnement, à destination de clients maraîchers, horticulteurs, viticulteurs.
Chaque année, 6 000 m3 de fumier produisent ainsi cinq cents tonnes de lombricompost. Parallèlement, le « thé de compost », jus issu de la fermentation, est aussi récolté. « Avec six litres, on peut traiter un hectare. On a vendu 10 000 litres en 2016, on a la capacité d’en produire 150 000 chaque année. Vous imaginez le nombre d’hectares ainsi privés de pesticides ! » savoure David Lumet.
Le cavalier a non seulement réussi sa reconversion à la tête d’une belle écurie. Il a aussi réussi à mettre en musique une certaine idée du développement durable. Au-dessus des longues bandes de lombriculture, la toiture du hangar de 5 000 m2 récolte l’eau de pluie permettant d’humidifier le fumier de cheval soumis aux vers. Elle est aussi, sur sa face sud, constituée de 3 100 m2 de panneaux photovoltaïques produisant 400 kilowatts…
David Lumet ne le cache pas : c’est tout bénéfice. Un bénéfice économique et écologique : « Je ne peux pas gagner de l’argent en faisant n’importe quoi. Il faut que ça ait un sens ! »