La photosynthèse artificielle, une technologie pleine d’espoir
Inspirées d’un processus naturel, les technologies de photosynthèse artificielle pourraient être d’un grand apport à la transition écologique. Observées par les industriels, les recherches se poursuivent pour améliorer le rendement avec des métaux abondants.
Publié le 25 août 2020 à 08:59
La photosynthèse artificielle est très prometteuse, mais n’est pas encore une préoccupation majeure des entreprises de l’énergie en France. Pour Vincent Artero, directeur de recherche au CEA(Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) en chimie bio-inspirée, cela s’explique par « le besoin de faire encore de la recherche un peu lourde avant de faire du développement. » Mais de grands groupes énergétiques surveillent désormais de près les avancées de ces technologies.
Depuis la fin des années 1980, les recherches se sont intensifiées. Elles s’inspirent du processus naturel de la photosynthèse. Il s’agit de la capacité des plantes et de certains micro-organismes, à capter l’énergie solaire pour faire réagir le dioxyde carbone (CO2) avec l’eau et produire des molécules carbonées essentielles à la vie cellulaire.
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Stocker l’énergie solaire
Les technologies de photosynthèse artificielle proposent ainsi de répondre à un enjeu phare de la transition écologique : stocker l’énergie solaire, caractérisée par son intermittence, sous la forme d’énergie chimique (produits carbonés ou hydrogène). Elles envisagent aussi le CO2comme une source de carbone alternative, par rapport au pétrole et charbon par exemple, et de le capter dans l’atmosphère. « Un objectif est de fermer le cycle du carbone de façon vertueuse », indique Marc Fontecave, professeur au Collège de France dans le laboratoire de chimie des processus biologiques.
En l’état, de nombreux systèmes de photosynthèse artificielle combinent des cellules photovoltaïques, destinées à transformer les photons du Soleil en électricité, et un électrolyseur. C’est le cas du dispositif de Marc Fontecave et son équipe. Le courant électrique produit est introduit dans l’électrolyseur, permettant l’oxydation de l’eau à une première électrode et, à une autre, la réduction du CO2, c’est-à-dire sa transformation en une molécule souhaitée. Les électrodes, qui ont un rôle de catalyseur, sont en cuivre. « Ce métal améliore la transformation du CO2 en des molécules plus complexes, telles que l’éthylène, un produit utilisé par l’industrie chimique, ou l’éthanol, qui est notamment un carburant », explique Marc Fontecave. C’est d’ailleurs sur ces deux produits que le Collège de France travaille depuis 2018.
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Améliorer les rendements
Problème : « Ces systèmes ont généralement un rendement [rapport entre l’énergie stockée dans les produits carbonés et l’énergie solaire utilisée] d’environ 2 ou 3 %, au mieux jusqu’à 10 % dans certains cas », rapporte Ally Aukauloo, professeur à l’université Paris-Saclay. Pour améliorer ce rendement, les chercheurs comptent sur l’utilisation de cellules photovoltaïques plus performantes et l’amélioration des électrolyseurs. D’où une compétition féroce à l’échelle internationale avec entre autres l’Allemagne, les Etats-Unis et la Chine.
Autre piste : reproduire un autre mécanisme de la photosynthèse naturelle, la photo-oxydation de l’eau, afin d’éviter l’étape de production d’électricité. « C’est la partie la plus difficile, car on ne sait faire ça qu’avec le platine ou l’iridium, le métal le moins abondant sur Terre », décrypte Ally Aukauloo.
Avec son équipe, Vincent Artero travaille ainsi sur un système visant à « combiner l’absorption de la lumière, la conversion en énergie et la catalyse ». Cette photo-électrode capte la lumière grâce à un oxyde composé de fer et de cuivre. Par excitation, le matériau produit un flux d’électrons utilisé par le catalyseur pour faire réagir l’eau et obtenir de l’hydrogène. « A partir de l’hydrogène, il existe ensuite des procédés pour fabriquer du méthane ou du méthanol », renseigne Vincent Artero.
« Un système de photosynthèse artificiel doit être robuste, efficace et peu cher. Pour le moment, on n’obtient que deux critères sur trois simultanément », résume-t-il. Selon lui, les systèmes d’électrolyse avec panneaux photovoltaïques pourraient répondre à ces trois critères en 2030. Pour les systèmes de photo-électrolyse, il faudra probablement attendre 2050.
Jonathan Grelier